SciELO - Scientific Electronic Library Online

 
vol.18 número59La paradoja de la educación brasileña: una relación antagónica entre el principio de realidad y el principio de desempeñoEl concepto de paradoja en los campos de la educación, de la intervención social y de la formación de profesores, especialmente en Brasil índice de autoresíndice de materiabúsqueda de artículos
Home Pagelista alfabética de revistas  

Servicios Personalizados

Revista

Articulo

Compartir


Revista Diálogo Educacional

versión impresa ISSN 1518-3483versión On-line ISSN 1981-416X

Rev. Diálogo Educ. vol.18 no.59 Curitiba oct./dic 2018  Epub 05-Feb-2020

https://doi.org/10.7213/1981-416x.18.059.ds03 

Dossiê

Exposer en protégeant, un paradoxe des politiques sociales au sein des établissements sociaux et médicisociaux français

Expose by protecting, a paradox of the social policies whitin French social and medical-social institutions

Jean-Yves Gélinier1  *

1Université Catholique de l’Ouest, Angers, France


Résumé

En France, via l’application des politiques sociales, les établissements sociaux et médicosociaux regroupent dans des enceintes semi-fermées des personnes vulnérables dont certaines sont violentes et d’autres plus fragiles donc potentiellement plus à même d’être victimes. Les travailleurs sociaux y exerçant sont donc au quotidien face à une injonction paradoxale de protéger de la société extérieure en exposant à la violence intérieure de l’établissement. Cet état de fait met le travailleur social dans un état de dissonance cognitive et d’inconfort psychologique, dû à l’incohérence de la situation, où pour continuer à trouver sens à sa mission, il devra mettre en place a postériori des conduites adaptatives génératrices de nouvelles cohérences subjectives, telles que négation, oubli voire rejet des victimes et relativisation, habituation voire déni de cette violence.

Mots clés: Violence; Etablissements sociaux et médicosociaux; Usagers; Sens; Rationalisation

Abstract

In France, through the application of social policies, social and medicosocial institutions bring together vulnerable people in semi-closed areas, some of whom are violent and others frailer and therefore more likely to be victims. The social workers working there are therefore confronted on a daily basis with a paradoxical injunction to protect the external society by exposing them to the internal violence of the institution. This situation puts the social worker in a state of cognitive dissonance and psychological discomfort, due to the inconsistency of the situation, where in order to continue to find meaning in his mission, he will have to set up adaptive behaviours afterwards that generate new subjective coherences, such as negation, forgetting or even rejection of the victims and relativization, habituation or denial of this violence.

Keywords: Violence; Social and medico-social institutions; Users; Meaning; Rationalization

Si la violence est un phénomène social protéiforme propre à toute société humaine (HOBBES, 2000; FREUD, 1994; MAFFESOLI, 2009), en France, la violence entre les personnes vulnérables au sein des établissements sociaux et médico-sociaux peut être quotidienne. Les formes qu’elle revêt sont multiples et leurs intensités variables: incivilités, insultes, menaces, vols, racket, coups, agressions sexuelles, etc. L’acceptation implicite et/ou la banalisation de ces actes très fréquents par l’environnement des personnes, au motif (conscient ou non) que les usagers sont sous l’emprise de problématiques complexes, alimente encore cette tendance. Ces actes de violence réduisent la citoyenneté effective des personnes vulnérables et par là-même l’équilibre des institutions qui les accueillent.

Dans un souci politique de protection sanitaire et sociale, les établissements sociaux et médicosociaux regroupent en leur sein des personnes vulnérables qui présentent un danger pour elles-mêmes et des personnes vulnérables qui présentent un danger pour elles-mêmes mais aussi pour autrui. Nous assistons ainsi à la cohabitation organisée de personnes plus vulnérables que le commun des mortels, avec des personnes plus violentes que ce même commun du fait de leur vulnérabilité initiale. Un cocktail souvent détonnant qui avec de bonnes intentions préalables, peut mener aux antipodes de ce qui était attendu. Ainsi protection et mise en danger, qui en voulant se distancier voire se rejeter, paradoxalement s’engendrent en même temps. Nous sommes ainsi face à une coexistence énigmatique d’une action qui crée son contraire et par là-même rend inaccessible l’objectif initial, une annulation réciproque qui engendre un paradoxe. En référence à Yves Barel (1989), nous entendrons par paradoxe, concept que nous développerons tout au long de cet écrit, l’imbrication entre une forme de confusion de niveaux «logiques» initialement distincts et hiérarchisés que sont protection et mise en danger, et l’expression d’une contradiction, à savoir le fait qu’une personne vulnérable placée en établissement social ou médicosocial pour sa protection, peut se trouver par cette même action, plus exposée à la violence.

Malgré cet état de fait les institutions perdurent et les travailleurs sociaux continuent à vouloir assurer leur mission d’accompagnement. Il n’y aurait pas de solution linéaire de type cartésienne sans que l’antinomie destructrice s’immisce au continu dans l’action initialement empathique, atteignant de manière souvent douloureuse l’intériorité des acteurs.

Une situation dont, ni la raison, ni la conviction, ni le professionnalisme environnant, ne peuvent apporter de dénouement en parfait accord avec la logique philanthropique initialement désirée. Un cas de conscience éthique, déontologique, philosophique, juridique et politique, où vouloir démêler la complexité du sujet afin d’atteindre une solution radicalement tranchée et nette, est de l’ordre du mythe de Sisyphe. Ce type de situation où l’inconfort de la pensée peut être une constante, engendre un paradoxe à double contrainte englué dans l’univers cognitif et affectif du travailleur social, sans qu’aucun choix ne soit pour lui possible. Un état de fait qui traduit au final l’impossible réalisation de ce qui est ordonné et la réalisation de ce qui est proscrit.

Si le système de protection social qui vise à regrouper les personnes vulnérables en établissement protégé est, certes, cohérent, il est en même temps contradictoire par les expositions qu’il engendre, et s’il est, certes, contradictoire, il est en même temps cohérent. Ces phénomènes de violences quotidiennes entre personnes vulnérables au sein des établissements sociaux et médicosociaux, existent depuis des décennies sans pour autant que l’on ait assisté à une levée de boucliers, virulente, générale et jetée à la face de la société. Tout semble se passe dans un climat feutré et trop souvent figé comme si au fil des décennies les vagues de nouveaux travailleurs sociaux se synchronisaient avec le bain culturel existant dans lequel on les immergeait. Christophe Dejours parle ainsi «d’aliénation culturelle» (2000, p. 255) lorsque le sujet fait reconnaître ses actes par autrui, mais que cette reconnaissance se joue de part et d’autre dans un monde psychique qui a perdu ses liens avec le réel. Cela nous renvoie aussi quelque peu à Pierre Bourdieu et à son point de vue objectiviste1 sur le concept de «violence symbolique» (BOURDIEU, 1992) où selon l’auteur, la pire des violences symboliques serait la certitude que «cette violence va de soi», légitimant ainsi un fonctionnement social existant, un ordre établi. Cet état de fait engendrant des rapports de dominations subis et souterrains aux effets sociaux pouvant être redoutables. «Il est plus facile de faire semblant d’ignorer le côté paradoxal de toute situation, que de l’exorciser pour de vrai» (BAREL, 1989, p. 111).

Les vulnérables victimes sont par la force des choses, souvent contraints de reconnaître comme légitime un fonctionnement institutionnel qui les expose à la violence des vulnérables violents, tout en mésestimant ou ignorant son caractère arbitraire d’ordre aliénant. Cette violence qui pour nous n’est pas suffisamment conscientisée car au moins partiellement intériorisée dans l’habitus de chacun des acteurs doit être soulignée et remise en avant au regard de ces derniers. Car la pleine conscientisation et la reconnaissance de ce phénomène ne doit pas dépendre spécifiquement de l’intensité des souffrances subies mais du degré de leur visibilité dans l’espace social et de l’empathie qu’elles pourraient susciter sur la base de solidarités éthiques, philosophiques, culturelles ou encore politiques.

Si nous recensons les causes majeures de cet état de fait paradoxal, nous avons:

  • 1) Les limites du professionnalisme : Ce sujet de la violence entre les usagers, face à des personnalités complexes (troubles psychiques, toxicomanie, etc.) dont ils ne peuvent à long voire court terme, sociabiliser les comportements, confronte les travailleurs sociaux et leurs institutions aux limites de leurs compétences professionnelles. A cela s’ajoute le fait que la violence des usagers est un processus qui ne s’anticipe pas toujours.

  • 2) La maltraitance institutionnelle : Les politiques de protection sociale imposent technocratiquement de regrouper une grande partie des personnes reconnues vulnérables dans des établissements sociaux et médicosociaux semi-fermés. A savoir des personnes vulnérables violentes avec des personnes vulnérables. Cette cohabitation est politiquement, juridiquement et institutionnellement organisée sous forme de semi-liberté voire de contention. Les établissements sociaux et médicosociaux créent ainsi des «microsociétés» en partie closes avec:

    • - des densités d’individus supérieures à celle d’un milieu de vie normal, où les distances critiques d’acceptation de l’autre et les distance de fuite, sont par la force des choses plus souvent malmenées qu’en milieu ordinaire et où la forte densité d’occupants au m² est facteur de violence;

    • - des individus avec des profils propices à favoriser l’agression ou la victimisation.

    • - et de surcroit avec une cohabitation de proximité de profils parfois incompatibles (par exemple autisme et personnes envahissantes).

  • 3) L’Habituation: La fréquence importante de cette violence quotidienne, additionnée à l’impuissance régulière de l’action éducative, mettent en échec un idéal thérapeutique, et engendre un fatalisme au sein du personnel, voire même des familles. Cette impuissance et ce fatalisme paralysent les capacités de réaction et par là-même justifie un certain immobilisme. Cet état de fait engendre de la part des travailleurs sociaux une diminution des conduites (phénoménologie : une conduite tournée vers le sens, c’est le comportement avec une intention) pour une augmentation des comportements (behaviorisme : où il y a moins voire plus le sens). On finit par « s’habituer » à cette violence et de ce fait on est amené implicitement à ne plus voir cette violence comme telle. Jacques Danancier évoque alors cette attitude des travailleurs sociaux qui consiste à «faire le dos rond». L’exposition au continu d’une tâche irrésolvable, à savoir l’éradication de cette violence entre personnes vulnérables, finit par exposer le travailleur social à un épuisement de son empathie et donc à un éloignement émotionnel et affectif des situations vécues.

  • 4) Silence et tabou : Le silence ou le tabou constaté lors de nos travaux de recherche est le fruit des thématiques des trois paragraphes précédents. L’évidence comportementale violente du malade mental ou encore du marginal en grandes difficultés sociales et l’impossibilité de l’éradiquer, est telle que parfois il n’y a plus lieu de vouloir en répondre.

Ainsi l’éthique initiale visant le rejet de la souffrance de l’autre serait partiellement anéantie, la vision ou l’écoute de la souffrance de l’autre n’engendrerait plus autant d’émotions révulsantes mais plutôt une forme d’indifférence. Comme si nous passions d’un système culturel externe, à savoir la société de monsieur tout le monde, à un système culturel interne, l’établissement social ou médicosocial, où le passage engendrerait une modification de perception de la souffrance et par là-même une modification des attitudes et comportements réponses à son encontre. Face à l’irrésolvabilité d’un problème fréquent et douloureux le travailleur social pour survivre psychologiquement, est contraint d’user d’une intelligence pratique et «semi-clandestine» (DEJOURS, 1998, p. 66) des situations, qui l’amène à négliger, oublier, transgresser, enfreindre, etc. Intelligence pratique semi-clandestine des situations, qui contribuera aussi au maintien des politiques de protection sociale en l’état. A l’impossible nul n’est tenu.

Yves Barel nous parle alors de double bind (1989, p. 262):

Le double bind est construit sur l’admission d’une partie de la réalité, et la négation d’une autre partie de la même réalité. C’est ce mélange de réalité et d’irréalité qui fait du double bind une irruption de l’absurde, de l’impensable, dans les conduites sociales et humaines, une oscillation permanente entre le rêve et la réalité, le réel et l’irréel, le vrai et le faux. Le double bind sort de la réalité ou, plus exactement, crée une réalité seconde, une réalité de l’absurde.

Nos travaux de recherche sur un échantillon de 124 agressions observées entre usagers d’établissements sociaux et médicosociaux, retranscrites, disséquées et analysées, nous exposent que dans 78,1% des cas, la problématique initiale de la personne est au moins en partie la cause de l’acte de violence. Ces mêmes travaux nous exposent que dans 47.2 % des cas la problématique initiale de la personne est au moins une des causes voire la cause du fait d’être victime, soit par des rôles actifs, soit par des rôles passifs comme le fait d’être très vulnérable par exemple. A propos des rôles passifs Ezzat Abdel Fattah pionnier de la victimologie, parle de «victimes catalyseuses» (apud CARIO, 2004, p. 34.), concept qu’il décompose en deux groupes:

  • - Les rôles passifs ou statiques alimentés par des prédispositions victimogènes, soit 28.8% de notre échantillon de population: 15.6% de personnes sont en situation de fragilité psychique, 3.3% se positionnent à l’avance en victime, 3.3% ont des difficultés sociales, 3.3% ont peur de l’agresseur, 2.2% sont fragiles physiquement, 1.1% est sans défense;

  • - Les rôles actifs ou dynamiques relatifs aux attitudes et comportements de la victime lors de la genèse de l’agression: 10% d’initialement violents, 6.7% qui ont des comportements incitateurs à la violence, 1.1% qui a un passif conflictuel avec l’agresseur ; soit au total 17.8%.Nous aurions ainsi 46.6% de notre échantillon de population « prédisposé » à être victime.

Le croisement de ces deux constatations confirme que les politiques de protection sociale concentrent les personnes vulnérables entre elles afin de les protéger, mais que paradoxalement cette vulnérabilité est à la fois, sur un même lieu, source d’actes de violence et source d’acte de victimisation. Les politiques de protection sociale à l’égard des personnes vulnérables se noient quelque peu dans l’éternel paradoxe philosophique de l’unité dans la multiplicité, et de la multiplicité dans l’unité. Elles ont mis en place un système de protection social en partie unique qui vise à faire vivre ensemble par franges une multiplicité de personnes vulnérables, et en même temps harmoniser la vie des groupes formés avec la spécificité de chacun face à sa vulnérabilité ou sa violence. Plus paradoxalement il s’agit, pour protéger le vulnérable, de plonger son unicité au beau milieu d’une forte densité organisée de misères humaines, de souffrances divers et variées, d’inégalités et autres sources d’expression de violences humaines et sociales. Une politique de régulation par la confusion.

Une action faite dans le but d’obtenir un résultat considéré comme positif entraîne souvent des effets paradoxaux, l’effet positif attendu et un effet négatif voire catastrophique, non prévu. […] Le bien générateur d’un mal et le mal d’un bien ne cessent de confronter au paradoxe. […] On ne pense l’un que par rapport à l’autre. Il y a toujours des dilemmes, tels que le moindre choix dans la complexité et la diversité d’une situation a sur elle des effets qui retentissent négativement sur l’effet visé, cela s’appelle par exemple des dommages collatéraux (BARRUS-MICHEL, 2013, p. 34; 36).

Alors «Un mécanisme de refoulement entre en jeu qui fait de la stratégie, pour son auteur, un paradoxe qui s’enfouit, qui se cache à lui-même» (BAREL, 1989, p. 227).

Si le paradoxe est un enchevêtrement hiérarchisé impossible à stabiliser et à figer, le travailleur social faute de le maîtriser ne pourra s’efforcer que de le rendre plus vivable et plus supportable. Donc face à l’impossibilité de hiérarchiser des choix, des conduites adaptatives des travailleurs sociaux apparaissent. Ces dernières en référence à Yves Barel (1989), peuvent être classées en quatre catégories :

1) La stratégie simple qui consiste à ne prendre en compte qu’un aspect du dilemme.

Par exemple dans le cadre de notre terrain de recherche, il s’agit en instaurant une dimension hiérarchique, que par un niveau conventionnelle d’autonomie établi par les politiques de protection sociale, la protection globale prime totalement et totalitairement sur l’exposition individuelle et qu’ainsi ce dernier point n’ait plus lieu d’exister au débat.

2) Le compartimentage qui consiste à réaliser chaque alternative dans des espaces ou des temps différents.

La pensée humaine se régionalise et se reconstruit en compartiments plus ou moins étanches. […] La pensée écartelée, continue à marcher sur ces deux jambes, mais chaque jambe feint d’ignorer ce que fait l’autre, à moins qu’elle ne lui dénie, tout simplement, le droit à l’existence (BAREL, 1989, p. 252; 253).

La pensée n’admet qu’une seule réalité vraie à la fois. Le travailleur social adopte alors de manière consciente ou inconsciente des conduites que l’on qualifierait dans le vocabulaire courant de schizophrénique, car une partie de sa pensée doit ignorer ou ignore plus ou moins inconsciemment ce que fait l’autre partie et vice et versa, et il y a ainsi une forme de perte de contact avec la réalité, une forme de déni du monde réel qui l’entoure.

3) Le compromis qui prend en compte les alternatives au même moment et dans le même espace, mais en abaissant l’intensité des injonctions. Il permet d’activer les injonctions sur le même temps et sur un même lieu, mais en atténuant la force de ces injonctions de façon à affaiblir l’intensité du paradoxe.

Le compromis désigne une manière d’agir dont la caractéristique n’est pas tellement d’emprunter un peu de chaque extrême ou contraire et d’abandonner le reste, mais de les prendre tous les deux en même temps et au même endroit. […] Le compromis n’est donc pas une conciliation, un moyen terme, un produit bâtard. […] Dans tous les cas, je com-promets un extrême par l’autre, je fais coexister, cohabiter deux processus sans les atténuer, et sans assurer la victoire de l’un sur l’autre. […] La possibilité de pratiquer le compromis est soumise à une condition relativement restrictive. La règle de l’unité de temps et de lieu implique des acteurs et des domaines d’actions d’une nature telle qu’il soit possible à la même « source » d’émettre simultanément le message et le méta-message, c’est-à-dire d’agir instantanément à deux niveau de la réalité à la fois (BAREL, 1989, p. 231; 233).

4) L’oscillation qui alterne sporadiquement le choix entre les alternatives. Il s’agit de se situer successivement et de façon aléatoire au sein des différentes injonctions paradoxales.

La pensée humaine oscille d’un vision et d’une stratégie à l’autre, chaque choix préparant les conditions du choix contraire, de sorte que l’oscillation est à la fois le choix d’une solution et le refus de ce choix. […] quand on ne peut ni obéir ni désobéir, quand on ne peut ni adopter une stratégie de compromis ni ‘fractionner’ le paradoxe et le faire assumer par d’autres, on est condamné à entrer dans une suite sans fin d’oscillations entre un choix et le choix contraire [...] de sorte que la stratégie devient un refus de choix en même temps qu’un choix. […] Cela ressemble au compartimentage en ce qu’il se présente comme un empilement de stratégies simples. Il en diffère en ce que l’implication réelle entre ces stratégies simples ne peut pas être occultée et en ce que c’est le même acteur qui est porteur des différentes stratégies simples (BAREL, 1989, p. 253; 254; 257).

Via l’utilisation de ces quatre stratégies, les travailleurs sociaux s’installent dans un processus d’adaptation qui élimine artificiellement le paradoxe du champ de vision.

De l’analyse de notre corpus constitué de 30 entretiens, via l’utilisation de ces quatre conduites adaptatives, il ressort deux dominantes de gestion du paradoxe qui sont de l’ordre :

  • 1) Du compromis: l’espace des établissements sociaux et médicosociaux est un espace à part, au sein duquel on accepte, on néglige, on banalise, on relativise, on oublie, on ignore, on normalise des faits ou des potentiels faits de violence future.

  • 2) De la stratégies simple: le travailleur social et son institution se focalisent essentiellement sur le vulnérable violent et en oublient quelque peu la victime.

Les conduites adaptatives de « compartimentage » et « d’oscillation » sont très peu utilisées, est-ce parce que ce sont les moins facilement tenables en termes de stabilité de sens professionnel et éthique ? La question est posée.

Le paradoxe est une impasse logique tout en étant un mouvement perpétuel qui, en affirmant deux contraires en même temps, met l’esprit humain dans une forme d’inconfort psychologique difficilement supportable à long terme. Dans le cadre de notre étude, l’insatisfaction résultant d’un mode opératoire inadapté avec l’éthique et le professionnalisme des travailleurs sociaux, à savoir exposer en protégeant, engendre ainsi un conflit intrapsychique. Pourtant nous pouvons dire d’une manière générale, que l’homme tend à maximiser la cohérence de son univers cognitif, ou plus concrètement à trouver ou organiser au continu une cohérence entre sa pensée et ses actes. D’une idéologie ou de valeurs initiales, découleront des attitudes et comportements déterminés et adaptées aux premières, c’est ce que Festinger dénomme « la consistance » (FESTINGER apud BEAUVOIS et JOULE, 1981, p. 15). Mais lorsque l’imposition de nouvelles conduites est en total désaccord avec l’idéologie et les valeurs initiales il y a alors inconsistance ou dissonance cognitive.

En psychologie sociale l’inconsistance ou la dissonance cognitive est la simultanéité de «cohérences» et de cognitions antagonistes qui de ce fait engendrent un inconfort psychologique en raison de leurs caractères inconciliables. Cette existence simultanée de cohérences antagonistes va engendrer chez l’individu une tension intérieure, un inconfort «psycho-logique», soit une dissonance cognitive, et cet individu va devoir mettre en place des stratégies pour transformer cette coexistence discordante d’idées, de valeurs ou de faits en une cohérence qui va éliminer cet état perturbateur de tension intérieure qui peut s’exprimer sous forme de déception, d’embarras, de culpabilité ou de regret. Pour accéder de nouveau à son confort «psycho-logique» le travailleur social va devoir modifier ses attitudes ou ses croyances jusqu’à ce qu’elles se retrouvent en cohérence. Les modifications peuvent être des changements concrets du contexte perturbateur ou, souvent à défaut, une altération de la perception, une modification de jugement, que l’on peut avoir de la réalité. Il s’agit dans ce dernier cas de nier, de relativiser, de modifier, de déformer, de rejeter le fait dissonant. A défaut de ne plus pouvoir être rationnel, le travailleur social devient rationnalisant. A défaut de ne plus être dans le registre de la cohérence intellectuelle, le travailleur social glisse vers une rationalisation des conduites, produites par des circonstances imposées. «Le processus de rationalisation est la destitution de la raison objective au profit de la raison subjective» (HORKHEIMER, 1974, p. 13-65).

La rationalisation est le processus par lequel une personne ajuste a posteriori ce qu’elle pense (ses attitudes) ou ce qu’elle ressent (ses motivations) à l’acte qu’un agent de pouvoir à su obtenir d’elle ; alors même qu’elle se pense et vit comme ayant été libre de choisir et le demeurant (CARIO, MILBERTEAU et MBANZOULOUP, 2004, p. 48).

Si nous représentons l’état cognitif du travailleur social observant un acte de violence entre personnes vulnérables, nous obtenons ceci:

La triade ci-dessus présente par des flèches les relations que l’on peut inférer entre ces divers éléments de l’univers cognitif du travailleur social, et par des signes, les attitudes et pensées à l›égard ou à l’encontre des éléments de ces relations. Nous considérons ainsi que :

  • - l’attitude du travailleur social à l’égard des personnes vulnérables, qu’elles soient victimes ou violentes, est initialement positive car le travailleur social chargé d’empathie, est auprès de ces dernières pour les accompagner, pour les aider.

  • - la relation entre le vulnérable violent et le vulnérable victime est négative car fondée sur la souffrance et le mépris.

Si l’on se réfère à la théorie de l’équilibre de Fritz Heider (1944, p. 358-374) proche de la théorie de la dissonance cognitive, cette triade est déséquilibrée ou inconsistante, car le produit des signes n’est pas positif. Ou plus concrètement, le travailleur social supportera difficilement d’avoir à l’esprit à un temps t, des relations et leurs opposés, des implications et leurs contraires. De ce fait cette triade ne pourra perdurer en l’état, car une forme de pression psychologique fondamentale amènera le travailleur social à chercher un état d’équilibre, un état de consistance, afin de ne plus avoir à l’esprit que des relations ou des implications dont les unes découlent « psycho-logiquement » des autres. Cet état futur sera le fruit de la modification de l’attitude du travailleur social à l’égard du vulnérable victime, ou/et du vulnérable violente, ou/et de l’acte violent.

Plus concrètement il faudra :

  • - soit que l’attitude à l’égard de l’acte violent devienne positive.

  • - soit que l’attitude à l’égard du vulnérable violent devienne négative.

  • - soit que l’attitude à l’égard du vulnérable victime devienne négative.

  • - soit que l’attitude à l’égard de l’acte violent devienne positive, et négative à l’encontre à la fois de la victime et de l’agresseur.

Mais à ces 4 éventualités puisées dans la théorie de la dissonance cognitive de Léon Festinger nous prendrons la liberté d’en ajouter d’autres, engendrées par notre ajout du chiffre zéro dans le produit des signes, zéro l’élément absorbant de la multiplication, zéro introduit à la place de signes - ou de signes + en fonction des situations. Le chiffre zéro traduisant dans le cadre de nos travaux de recherche la traduction de la présence du vide, de l’oubli ou encore du déni.

Si l’élément absorbant s’introduit dans le produit des signes de nos triades, mathématiquement il ne positive pas le résultat, mais par contre il annule le résultat négatif qui devient zéro. Ainsi selon notre hypothèse il « absorbe » la dissonance cognitive et l’inconfort psychologique.

L’intérêt d’ajouter le zéro élément absorbant à la théorie de Festinger est de pouvoir affiner notre analyse de la stratégie simple qui consiste à ne prendre en compte qu’un aspect du dilemme, voire à nier les deux aspects, en introduisant :

  • 1) La non considération d’un ou plusieurs éléments ou d’une plusieurs relations de notre triade.

  • 2) L’impact de l’oubli dans l’organisation de nos triades.

  • 3) La relativité des signes positifs ou négatifs. Si par exemple je suis amené à observer que la relation entre deux point de notre triade est une confusion de positivité et de négativité, je partirai de l’hypothèse que cette somme de + et de - devient 0 l’élément absorbant.

a) NIER LE VIOLENT ET LA VICTIME (STRATEGIE SIMPLE)

Si le produit des signes n’est pas positif, en revanche il n’est plus négatif. Nous avons ainsi analysé des interviews où les concepts de violents et de victimes sont écartés voire délibérément rejetés par le travailleur social pour conserver une vision univoque de personnes vulnérables à aider. Nous sommes ainsi dans une stratégie simple de gestion du paradoxe, où il y a négation simultanée des deux aspects du dilemme.

b) POSITIVER LE VIOLENT ET OUBLIER LA VICTIME (STRATEGIE SIMPLE)

Une des conditions sinequanone pour être travailleur social, est d’être chargé d’empathie à l’égard de l’autre. Il est nécessaire de comprendre l’autre et de croire en lui, mais jusqu’à quelle limite ? Nous avons alors un discours récurrent et fréquent de travailleurs sociaux, dont l’empathie est focalisée sur le violent. Il y a absolue nécessité de continuer à lui donner sa chance, mais ce, sans nécessairement penser aux victimes passées et futures jusqu’à ce qu’il ne devienne éventuellement plus violent. C’est l’espoir du mieux à propos du vulnérable violent qui alimente le processus de rationalisation, c’est une forme de roulette russe .La potentielle violence à venir est dissimulée, négligée, oubliée, transformée en 0 élément absorbant. Ainsi le produit des signes de notre triade n’est plus négatif mais égal 0.

C) NEGATION DE LA REALITE OU DENI DE LA VIOLENCE FAITE A AUTRUI

Au sein de ce chapitre la transformation du signe - en 0 sera le fruit soit d’une négation ou d’un déni de cette violence, il s’agit de faire disparaitre le problème en le niant, soit d’une forme de positivation partielle de l’acte violent, donc insuffisante pour transformer le - en +, mais suffisante pour nous faire ramener le - à l’état 0.

Nous avons ainsi observé au sein de nos questionnaires et interviews diverses stratégies adaptatives telles que :

1) Le Déni (STRATEGIE SIMPLE)

Il est difficile d’accueillir des émotions négatives telles que le désarroi face à notre incompétence partielle à protéger le vulnérable, la souffrance à recevoir sa douleur, ou encore la tristesse à l’observation des conséquences funestes des actes posés. Nous observons alors l’apparition de certains mécanismes de défense conscients et/ou inconscients d’évitement, d’aveuglement, de déni, dont nous formulons l’hypothèse qu’ils ont pour fonction première de protéger psychologiquement de la parfois dure réalité.

2) «Etouffer l’affaire, silence, tabou» (STRATEGIE SIMPLE)

Monitrice Educatrice d’ITEP, interviewée : «parce que c’est vrai qu’on ne dit pas tout, on ne peut pas tout raconter…»

Cadre CHRS interviewé : « si j’interviens si ça se trouve, je risque d’envenimer les choses. »

Recouvrir cette violence d’une chape de plomb permet de ne plus la voir et donc de ne plus avoir à l’affronter et ainsi éliminer la dissonance cognitive.

3) L’oubli (STRATEGIE SIMPLE)

Oublier l’acte de violence ou ses impacts, c’est le convertir en 0, ce chiffre qui symbolise le rien le vide et ainsi écarter l’inconfort de l’injonction paradoxale.

Cadre d’ITEP interviewé : « je sais même plus si y’a eu coup de poing ou pas coup de poing dans l’acte, euh… »

4) L’habituation (COMPROMIS)

« Tout ce qui est constant dans notre champ de perception tend à disparaître de la conscience. De même, toute action ou expérience systématiquement répétée cesse de stimuler l’attention et la sensibilité. » (MÉTAYER, 2013, p. 82) Ainsi apparaît l’habituation, ce processus qui engendre une diminution des réponses d’un individu à un stimulus lorsque ce dernier lui est présenté de façon continue et sans renforcement. S’il est difficile de modifier les signes de la triade, on peut réduire la dissonance en ajoutant à celle-ci des notions consonantes nouvelles, ainsi l’on peut relativiser le signe négatif de l’acte violent en lui superposant le fait que finalement la victime n’en souffre pas trop et rebondit rapidement ou encore que finalement les usagers s’habituent à la violence de Monsieur X. Quand ce n’est pas l’usager lui-même qui s’habitue :

Usager Foyer d’Hébergement interviewé : « Des mains levées comme ça, c’est tout, pas grand-chose. […] Des menaces, c’est tout. […] Bah des fois, des fois ça y va les insultes ! […] je trouve que c’est un foyer calme, donc ça va. Bah y’a pas trop de violences, à part les paroles, et des coups qui… les coups de temps en temps».

5) La tolérance professionnelle (COMPROMIS)

Le travailleur social peut être amené à relativiser la gravité de l’acte en lui attribuant des circonstances atténuantes, par le fait par exemple, que le passage à l’acte violent puisse se résumer essentiellement à son regard, à l’expression d’un symptôme d’une violence initialement subie pendant l’enfance. Le vulnérable violent ne pouvant être totalement responsable de l’expression ultérieure des mauvais traitements qu’il aurait pu endurer. Ainsi l’acte violent n’est plus négatif au regard empathique du travailleur social qui le considère comme un symptôme d’une pathologie.

Cadre d’ITEP, interviewé : « Ça fait partie de leurs symptômes. […] Moi la violence je l’entends effectivement comme : « Venez-vous occuper de moi […] c’est un cri d’appel quoi. Qu’est pas bien adapté, qu’est pas correct du coup, qui est condamnable, je veux bien l’entendre (rires), mais c’est pas mon boulot. »

Usager CHRS interviewé : « parce que dans le fond euh... voilà il y a pas de mauvaise graine, c’est..., c’est... le parcours des gens qui fait que... »

6) Croire au-delà de la réalité (STRATEGIE SIMPLE)

Le travailleur social est chargé d’espoir pour le vulnérable violent, même s’il est conscient que le projet est une oscillation entre le souhaitable et le possible, il mise avant tout sur le souhaitable c’est-à-dire que le vulnérable violent ne passera ou repassera pas à l’acte : Educatrice de CHRS : « On ne peut pas nommer quelque chose qui n›est pas encore arrivé (le potentiel acte de violence ), avec ce groupe, avec cette histoire-là... Mais effectivement c’est sûr, il y a des victimes potentielles, des personnes vulnérables bien sûr, enfin tout le temps. Mais sur qui ça va tomber...(Rires) . Mais est-ce que ça va tomber ou se... se réactiver à ce moment-là, est- ce que la personne n’a pas ou changé, ou pris en compte un peu tout ça aussi... »

7) L’auto-accusation (COMPROMIS)

Que ce soit en relation directe avec les causes invoquées des violences citées, ou de manière indirecte dans un discours plus général sur les violences dans leur globalité, les travailleurs sociaux s’attribuent régulièrement un rôle dans la genèse de ces actes. Cette attitude que l’on peut considérer comme une forme de culpabilité, met le travailleur social dans un certain embarra pour véritablement négativer l’acte de violence. Le négativer serait alors remettre en cause son mode d’accompagnement.

Cadre CHRS, interviewé : « Mais euh... les éducateurs, enfin nous on a notre part aussi de responsabilité là-dedans, c’est clair et net».

d) POSITIVER LA VIOLENCE, LA VICTIME ET LE VIOLENT

Banalisation de l’acte d’agression par le rire (COMPROMIS) Une attitude que nous pouvons interpréter comme une forme de «positivation» de l’acte d’agression est le fait de rire des violences subies. Rire rencontré très fréquemment sur l’ensemble de nos entretiens, qui ne peut être que le symptôme d’une atténuation de l’attitude négative à l’égard de cet acte:« L’usage de la moquerie et du cynisme sont destinés à tourner en dérision des situations difficiles à vivre, parfois même humainement insupportable, selon le principe de catharsis. »(Dargère C, 2012, p. 119)

e) NEGATIVER LE VIOLENT ET LA VIOLENCE (IMPOSSIBLE STRATEGIE SIMPLE)

En fonction de nos interviewés et des situations vécues l’empathie éducative et soignante, initiale, perdure. Le travailleur social, même au sein d’attitudes négatives, ne peut se départir de sa philanthropie, de sa logique d’aide, de sa culture professionnelle. De ce fait les attitudes négatives initiales se meuvent même parfois en attitudes positives, elles peuvent ainsi aller de l’encontre à la faveur, de la mise en place d’obstacle à la prise en considération.

  • 1) On s’interdit de sanctionner le violent au motif de le mettre plus en difficulté.

  • 2) On s’interdit de « sermonner » le violent pour demeurer dans une démarche plus éducative qui est le rappel du cadre, qui plus est, ce rappel du cadre est organisé dans une démarche qui soit protectrice à l’égard du violent.

  • 3) Lorsque l’on est amené à isoler la personne violente on ne le revendique pas en termes de sanction mais en termes « d’aide ». Le travailleur social ne peut se départir de son empathie initiale il va même jusqu’à compatir à la « douleur » du violent isolé.

  • 4) Même processus lorsque l’on est amené à déposer plainte contre le vulnérable violent on ne le revendique pas en termes de sanction, en termes de justice voire en termes de règlement de comptes comme tout un chacun pourrait le faire, mais en termes « d’intérêt pour le jeune ». Qui plus est, cette action est traduite comme l’utilisation d’un nouvel outil face à l’impuissance de l’intervention éducative.

f) NEGATIVER LA VICTIME ET LA VIOLENCE ou, de la compassion à la souffrance à la souffrance de la compassion

La confrontation régulière voire quotidienne aux limites de son intervention, peut entraîner le travailleur social vers une forme d’épuisement émotionnel, elle-même pouvant engendrer une forme de repli sur soi sécuritaire, un désengagement de la relation empathique initiale notamment à l’égard de la victime. L’excès d’exposition à la souffrance des autres engendre parfois une forme d’usure de la compassion qui va se traduire par de la désensibilisation pouvant aller jusqu’au fait d’être blasé. Face à l’impuissance à éradiquer cette violence récurrente, alors, de la compassion à la souffrance va naître la souffrance de la compassion. Cette dernière engendrant apathie, résignation, démotivation, déprime, diminution des capacités cognitives, etc. Et c’est ainsi que pour survivre le travailleur social sera amené dans le cadre du processus de rationalisation à négativer la victime.

g) TOUT NEGATIVER ET MAINTENIR L’ETAT DE DISSONANCE COGNITIVE

Nous n’avons pas rencontré ce cas de figure sur notre échantillon de population, mais si tel était le cas nous pourrions formuler l’hypothèse qu’il soit la traduction d’un burnout engendrant une forme de démission professionnelle.

« Les paradoxes poussent certains à la démission ou au désespoir. »(BARUS-MICHEL J., 2013, p. 200)

La gestion des personnes vulnérables met alors dans une telle dissonance cognitive et donc un tel inconfort psychologique, qu’il n’est plus possible d’avoir une vision positive à leur égard. La philosophie et l’engagement professionnel, initiaux, s’érodent face au flot incessant et ingérable des situations de violence entre personnes vulnérables.

h) NEGATIVER LE VIOLENT, LA VICTIME ET POSITIVER LA VIOLENCE

Sans surprise nous n’avons pas rencontré ce type de configuration sur notre échantillon de population car il serait à l’antipode de ce que doit être l’état d’esprit d’un travailleur social.

Conclusion

Parfois, le paradoxe met au jour des insuffisances et des dysfonctionnements dans la constitution de l’humain ou dans nos institutions sociales, et il devient alors une invitation à prendre des mesures pour pallier ces carences. Le paradoxe est une invitation… à progresser.(MÉTAYER, 2013, p. 266.)

Cette citation résume l’essence même de nos travaux de recherche qui est de mettre au grand jour ces disfonctionnements pour ensuite travailler sur des préconisations nouvelles afin de réduire ces violences et la souffrance qui en découle.

Références

BAREL, Y. Le paradoxe et le système: essai sur le fantastique social. nouv. éd. aug. Grenoble : P.U.G., 1989. 331 p. [ Links ]

BARUS-MICHEL, J. L’énergie du paradoxe. Paris : Desclée de Brouwer, 2013. 217 p. [ Links ]

BEAUVOIS, J.-L. ; JOULE, R. Soumisssion et idéologies: Psychosociologie de la rationalisation. Paris : Editions Presses Universitaires de France, 1981. 208 p. [ Links ]

BOURDIEU, P.; WACQUANT L.. Réponses: pour une anthropologie réflexive, Paris : Seuil, 1992. 267 p. [ Links ]

CARIO, R.; GUILBERTEAU, A.; MBANZOULOU, P. La victime est-elle coupable? - autour de l’œuvre d’Ezzat Abdel Fattah, Paris : L’Harmattan, 2004. 122 p. [ Links ]

DANANCIER, J. La violence dans les établissements sociaux. Paris : Dunod, 2000. 180 p. [ Links ]

DARGÈRE, C. Enfermement et discrimination. Grenoble : Presse Universitaire de Grenoble, 2012. 215 p. [ Links ]

DEJOURS, C. Souffrance en France: La banalisation de l’injustice sociale. Paris : Du Seuil, 1998. 183 p. [ Links ]

DEJOURS, C. Travail, usure mentale. Paris : Bayard, 2000. 299 p. [ Links ]

FESTINGER, L. Une théorie de dissonance cognitive. Paris : Enrick B. Editions, 1957 - 2017. 298 p. [ Links ]

FREUD, S. Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort. Paris : PUF, 1994. 280 p. [ Links ]

HEIDER, F. Social perception and phenomenal causality. Psychology Revue, v. 51, p. 358-374, 1944. [ Links ]

HEIDER F. The psychology of interpersonal relations. New York : Wiley, 1958. Cité in BEAUVOIS, J.-L.; JOULE, R. Soumisssion et idéologies, Psychosociologie de la rationalisation. Paris : Editions Presses Universitaires de France, 1981. 208 p. [ Links ]

HOBBES, T. Le Léviathan. Paris : Folio, 2000. 1024 p. [ Links ]

HORKHEIMER, M. Eclipse de la raison. Paris : Payot, 1974. 220 p. [ Links ]

MAFFESOLI, M. Essai sur la violence. Paris : Editions CNRS, 2009. 212 p. [ Links ]

METAYER, M. Ces paradoxes qui nous habitent. Laval : Hermann, 2013. 281 p. [ Links ]

1 Pierre Bourdieu définit la violence symbolique à partir d’un point de vue objectiviste, celui du savant qui dévoile un mécanisme méconnu des acteurs eux-mêmes.

Received: October 02, 2018; Accepted: October 11, 2018

*

JG: Doutor em Ciências da Educação, e-mail: jean-yves.gelinier@orange.fr

Creative Commons License This is an open-access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License