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Revista Diálogo Educacional

versión impresa ISSN 1518-3483versión On-line ISSN 1981-416X

Rev. Diálogo Educ. vol.18 no.59 Curitiba oct./dic 2018  Epub 05-Feb-2020

https://doi.org/10.7213/1981-416x.18.059.ds06 

Dossiê

Paradoxe et travail social

Paradox and social work

Laurent Sautereau1  *

1Université Catholique de l’Ouest, Angers, France


Résumé

Dans le cadre de l’intervention sociale, un certain nombre de situations semblent insolubles pour les travailleurs sociaux. Nous postulons qu’une partie de ces situations mobilisent des paradoxes qui paralysent l’action et en détruise le sens. En nous appuyant sur les théories d’Yves Barel, nous expliciterons notre conception des situations paradoxales inscrites dans des contextes existentiels ainsi que leurs effets. Nous illustrerons ces théories dans le champ de l’intervention social par un exemple de terrain tiré d’une recherche doctorale, et nous verrons comment des stratégies dites « paradoxales » permettent aux acteurs de sortir de ces situations sans pour autant éliminer les paradoxes inhérents à l’activité humaine.

Mot-clés: Paradoxe; Stratégies paradoxales; Travail social; Accompagnement socio-éducatif

Abstract

When dealing with social intervention, the social workers often meet some situations which seem unsolvable. We predicate that part of these situations mobilizes some contradictions which paralyze the action and destroy its meaning. On the base of Yves Barel’s theories, we are going to clarify our conception of the paradoxical situations registered in existential contexts along with their effects. We are going to illustrate these theories in the field of social intervention with a practical example from a doctorate research and we will see how some strategies known as « paradoxical » allow the stakeholders to get out of these situations without actually excluding the contradictions inherent to human activity.propositions to build a critical education based on Freire’s pedagogical heritage.

Keywords: Contradiction; Paradoxical strategies; Social work; Socio-educational support

Introduction: quand le paradoxe paralyse l’action du travailleur social

L’ensemble de cet article est tiré d’une recherche réalisée dans le cadre d’un doctorat en Sciences de l’éducation en 2014 à l’université catholique de l’ouest et complétée par la suite de différentes expérimentations dans le cadre de formation à destination de travailleurs sociaux au sein d’établissements médicosociaux. Le point de départ de cette recherche a été l’observation des dispositifs d’analyse des pratiques mis en œuvre au sein des établissements médico-sociaux et sociaux et les difficultés exprimées dans ces dispositifs par les intervenants sociaux. Nous avons pu analyser qu’une partie de ces difficultés remettaient en cause pour le professionnel le sens de son action. Cette absence de sens ou l’incapacité à en produire pour l’acteur fige sa capacité à agir ou l’incite à agir de façon inappropriée. Cherchant à comprendre alors ce qui pouvait produire cette destruction du sens, nous avons pu vérifier, en s’appuyant sur les théories d’Yves Barel, que certaines de ces situations impliquaient le travailleur social dans une situation paradoxale. Ces situations paradoxales seraient inhérentes à l’action sociale. Nous définirons la nature de ces paradoxes et en analyserons leurs effets sur les pratiques professionnelles au travers d’exemples tirés de situations rapportées au sein d’un dispositif d’analyse des pratiques. Enfin nous décrirons comment un dispositif de formation peut permettre l’élaboration de stratégies paradoxales pour faire face à ce type de situation paradoxale.

Présentation du champ et des professionnels concernés

Nous utiliserons indistinctement dans cet ouvrage les termes de travail social, d’intervention sociale ou d’action sociale ainsi que travailleur social, intervenant social, bien qu’ils ne soient pas équivalents et renvoient à des formes d’action historiquement datées. Nous considérons dans cette étude que l’ensemble des modèles d’action professionnels visant à l’aide des populations sur le plan social appartiennent à un seul et même groupe professionnel exerçant dans un domaine cohérent, quel que soit les dénominations utilisées au fil du temps. Ce groupe professionnel recouvre quatre grands domaines d’intervention selon une étude de la DRESS (direction de la recherche des études, de l’évaluation et de la statistique apparentée au ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, et du ministère de la santé et des solidarités) de 2005:

  • - Le domaine constitué par les métiers de l’aide. Les métiers de l’aide ont pour objet d’améliorer les conditions de vie sur le plan social, économique, culturel et alimentaire des personnes et des familles. On y trouve entre autre les assistants sociaux qui apportent un soutien psychologique ou matériel, les conseillers en économie sociale et familiale concourent à l’information et à la formation de la gestion des actes de la vie quotidienne, les techniciens de l’intervention sociale et familiale (anciennes travailleuses familiales), les auxiliaires de vie et les aides à domicile aident dans les gestes de la vie quotidienne les personnes âgées, handicapées, ou des familles avec des enfants en bas âge.

  • - Le domaine constitué par les métiers de l’éducation spécialisée. Ils interviennent auprès d’enfants, d’adolescents ou d’adultes présentant des déficiences physiques ou psychologiques. On y trouve les éducateurs de jeunes enfants qui sont des spécialistes de la petite enfance et de l’enfance, les éducateurs spécialisés qui sont chargés, en dehors des temps scolaires ou de travail de participer à l’éducation d’un public en tenant compte de son handicap physique, sensoriel, intellectuel ou de sa situation sociale, les moniteurs éducateurs et les aides médico-psychologiques (désormais AES: accompagnant éducatif et social) concourent, dans le cadre d’une équipe éducative, à la vie quotidienne d’enfants, d’adultes ou de personnes âgées dépendantes. Et enfin les éducateurs techniques spécialisés et les moniteurs d’atelier qui sont centrés sur la formation professionnelle et l’accompagnement au travail.

  • - Le domaine constitué par les métiers de l’animation. Ils regroupent une diversité de situations professionnelles qui se sont développées à partir des actions d’éducation populaire. La création des diplômes d’état apparaît à la fin des années 70 sous la cotutelle du ministère de la jeunesse et des sports et des affaires sociales. L’intervention des animateurs se situe autant sur des aspects éducatifs, culturels que sociaux. En fonction des situations, ils sont plus au moins au contact permanent de publics d’enfants, de jeunes, de familles ou de résidants d’établissements médico-sociaux. Les diplômes de ce domaine sont répartis du niveau V au niveau II.

  • - Le domaine constitué par les métiers de l’accueil au domicile du professionnel. Le domaine de l’accueil comprend la prise en charge au domicile de l’intervenant social des personnes âgées, d’adultes handicapés, ou d’enfants ainsi que l’accueil familial thérapeutique. On y distingue l’assistant maternel qui accueil de jeunes enfants au domicile de façon non permanente confiés par leurs parents ou par un établissement d’accueil d’enfants de moins de six ans de type crèche familiale, et l’assistant familial qui accueille de façon permanente dans sa famille (famille d’accueil) des enfants en difficulté qui lui sont confiés dans le cadre du dispositif de protection de l’enfance.

Si le travail social est donc une constellation constituée des différentes planètes représentées par les différents métiers et les différents contextes d’exercice, il n’en reste pas moins que l’ensemble est porté par des valeurs communes et des principes d’action sensiblement identiques. Notamment, l’ensemble de ces professionnels se réfèrent à un modèle d’intervention mobilisant l’établissement d’une relation dite « d’aide » permettant au travailleur social d’accompagner le destinataire de son action dans la réalisation de l’amélioration de sa situation. Le terme générique d’accompagnement, tellement utilisé de façon indistincte qu’il en devient polysémique, désigne aujourd’hui autant une posture qu’une technique qui se caractérise par une volonté de se centrer sur les besoins, les attentes et les choix de la personne accompagnée, et donc de personnaliser et/ou d’individualiser l’intervention du travailleur social.

Quels sont les « symptômes » des situations paradoxales ?

Notre vision du paradoxe

On peut considérer que le paradoxe se manifeste quand deux injonctions ou affirmations s’opposent fondamentalement et se contredises dans une situation, sans que l’on puisse par un effort de logique ou de réflexion, éliminer définitivement une des injonctions ou affirmations pour pouvoir résoudre la situation. Rapporté au travail social, un exemple de paradoxe pourrait être de demander aux intervenants sociaux, dans leur accompagnement auprès de jeunes retirés à la garde leur famille qui les a mis en danger, de devoir les éloigner de leurs parents « défaillants » pour les protéger d’eux, tout en leur demandant de maintenir les liens familiaux, essentiels au développement de l’enfant. Les deux injonctions sont légitimes, mais elles semblent contradictoires dans la mesure où en réalisant l’une, l’intervenant social s’éloigne de l’autre, qui semble pourtant tout autant importante. Comment expliquer que ces deux injonctions soient mobilisées au même moment dans le même espace ?

Pour comprendre ce phénomène, nous avons utilisé les théories qu’Yves Barel a développé concernant le paradoxe et que nous restituons ici sous forme de quatre principes.

Premier principe; Une situation ou un évènement est la résultante de l’interaction « d’éléments » organisés sous forme de système, mais ces « éléments » sont eux-mêmes des systèmes, fruit des interactions entre les systèmes qui le compose. La vision systémique classique considère que les éléments d’un système sont hiérarchisés entre eux et mettent en œuvre une chaine d’action ou de réaction qui aboutit au produit observé sous forme d’évènement. Or, pour Barel, cette vision élémentariste ne rend pas compte de la réalité. « L’élément n’est pas l’autre ou le contraire du système: l’élément est aussi un système ou structure, et le système, à d’autres niveaux, devient un élément » (BAREL, 1989, p. 99). Il considère que les systèmes ne sont pas composés d’éléments stables qui interagissent mais plutôt d’autres systèmes. « L’unité d’un système n’est que le moment de fractionnement d’un méta-système » (BAREL, 1989, p. 82). Ou pour le dire dans une autre forme, un système n’est que la résultante de l’expression des infra-systèmes qui le compose. Comprendre ou analyser une situation n’est pas identifier les éléments qui composent cette situation mais plutôt identifier les systèmes qui y sont mobilisés, eux-mêmes composés de systèmes. Nous entendons alors par système, non pas un état stable d’éléments, mais comme un point d’articulation des différents infra-systèmes ou méta-systèmes équilibre et déterminé par le niveau d’observation à partir duquel on le considérera. Ce niveau d’observation correspond à ce qui semble visible à l’acteur qui vit une situation. À ce niveau d’observation, l’acteur prendra en compte les infra-systèmes comme s’ils étaient des éléments stables qui font système entre eux. Mais si l’acteur change de niveau d’observation, les éléments qui semblaient stables se révéleront être eux-mêmes des systèmes. « Un événement, un fait, un phénomène se produit dans deux ou plusieurs univers à la fois. Dans chaque univers il a son sens particulier ou sa fonction particulière. Si l’on regarde les choses au « niveau » de l’événement, celui-ci apparaît comme polysémique ou polyfonctionnel » (BAREL, 1988, p. 21).

Deuxième principe, les systèmes se recouvrent ou s’interpénètrent et entretiennent alors des rapports complexes et instables dans une relation que Barel qualifie de « fusion-séparation » et qui produit des confrontations, des oppositions et des paradoxes. Le terme « fusion-séparation des niveaux et de superposition « (BAREL, 1988, p. 20), indique dans son apparente contradiction le mouvement toujours possible entre les deux mouvements, soit fusionner les infra-systèmes pour donner l’illusion qu’ils ne seraient qu’un élément stable, soit les séparer pour les faire apparaitre comme distincts et contradictoires. La qualification de la relation entre les niveaux qui sont « hiérarchisés et ne le sont pas » renvoie à la réversibilité de cette identification en fonction des stratégies qui fait que parfois un système recouvre l’autre mais sans l’anéantir, et que parfois c’est l’autre système qui recouvre le précédent, il y a perméabilité des niveaux entre eux. « L’un et l’autre vivent paradoxalement et nous imposent leur paradoxe jusque dans notre stratégie de recherche qui ne peut ni choisir l’un ou l’autre niveau du paradoxe, ni osciller perpétuellement de l’un à l’autre, mais qui doit au contraire, tâcher d’occuper les deux niveaux à la fois » (BAREL, 1989, p. 99).

Troisième principe, les paradoxes dans les systèmes tels que définis dans les deux premiers principes sont nécessaires à leur fonctionnement. Barel observe que pour qu’un système soit en capacité de se produire et de se reproduire en permanence, il doit entretenir tous les possibles, c’est-à-dire de ne s’interdire aucune orientation potentielle, même les orientations les plus antagonistes pour justement conserver sa capacité d’adaptation. Les tendances contradictoires doivent subsister sans pour autant se détruire. Autrement dit, tout système, qui n’est rappelons-le que l’agencement momentané d’infra-systèmes, entretient des tendances contradictoires en son sein, au cas où il faille changer d’orientation. Jacqueline Barus-Michel observe la même fonction des paradoxes. L’auteur démontre que les paradoxes sont nécessaires au développement de la vie psychique du sujet et sociale du collectif. Les oppositions au sein mêmes des principes, valeurs, croyances, sont une source d’énergies positives au sens où elle met en mouvement la pensée et l’action. « Les paradoxes fonctionnent en effet comme des pièges ayant pris la forme de ces crises ou finissent par exploser les tensions dont ils sont porteurs, mais ils gardent comme vertu de poser les contradictions et de provoquer le changement» (BARUS-MICHEL, 2013, p. 176).

Quatrième principe, pour l’acteur d’une situation, la perception de la fusion ou de la séparation des différents niveaux d’infra-systèmes d’un système dépend des conditions psycho-affectives et psycho-sociales dans laquelle il est placé, il y a une dimension existentielle dans le paradoxe. C’est-à-dire qu’il ne s’agit pas simplement d’un problème d’observation ou de logique, le paradoxe s’inscrit dans un vécu affectif qui empêche l’acteur d’en identifier les rouages ou même de le conscientiser. Un acteur d’une situation est pris dans un paradoxe parce que les injonctions qui le constituent sont considérées toutes les deux comme recevable par celui-ci. Il faut en quelque sorte croire à la valeur des injonctions pour être pris dans le paradoxe.

Ce qu’il y a d’existentiel dans tout paradoxe, y compris le paradoxe logique, c’est la circonstance qui n’a rien à voir avec la logique, selon laquelle l’émetteur et le récepteur d’un message décident de s’enfermer dans sa littéralité, c’est-à-dire s’interdisent un méta-message différent du message et ne peuvent pas ne pas se l’interdire. En d’autres termes, il n’y a d’authentiques paradoxes qu’existentiels, […]. Pour qu’il y ait paradoxe existentiel il faut et il suffit que nous soyons placés en face d’une injonction à laquelle nous ne pouvons ni obéir ni désobéir, et que nous acceptions de subir cette injonction. Le paradoxe existentiel est ainsi affaire humaine et affaire sociale (BAREL, 1989, p. 21- 22).

Ainsi, il faut en quelque sorte que le contexte existentiel ou social soit favorable pour qu’un individu accepte de considérer comme cohérente des injonctions en provenance de deux systèmes distincts. Il s’agit ici d’une des conditions de la fusion des systèmes. A l’inverse, le contexte existentiel ou social du paradoxe, est aussi une des causes de la séparation des systèmes.

Les symptômes et les effets du paradoxe

Quand un système, composé de plusieurs infra-systèmes dont les orientations potentiellement contradictoires, est momentanément stabilisé, on peut dire qu’un choix a été opéré entre, par exemple une proposition A et une proposition B, sans toutefois qu’aucune des orientations ne disparaissent, Par contre, quand un paradoxe apparait, c’est que les deux propositions viennent se confronter dans le même espace au même moment. Il ne s’agit pas d’un simple dilemme entre deux options qui auraient toutes deux des aspects négatifs et des aspects positifs vis-à-vis de la situation à traiter et que pourrait résoudre une réflexion guidée par une éthique quelconque. Il s’agit de deux propositions qui, pour l’acteur, ont trois caractéristiques:

  • - Il semble impératif d’agir sans délais, c’est la force de l’injonction.

  • - Elles semblent exclusives, dans une logique de « ou bien ». C’est soit A, soit B.

  • - Chaque proposition, en cas de réalisation, aggrave l’aspect négatif de la situation que pourrait améliorer l’autre proposition, et au final aggrave la situation.

La situation paradoxale semble insoluble et la réflexion tourne en boucle selon la logique suivante: formulation d’un énoncé de sens qui se présente comme recevable et légitime ; formulation d’un second énoncé niant la valeur de vérité du premier ; production d’un troisième énoncé ou « méta-message » qui nie la valeur de vérité du second énoncé et rétablie la légitimité du premier.

Dans ces situations, et d’après, les deux termes de l’opposition ne se situent pas au même niveau, ou, autrement dit n’appartiennent pas au même « infra-système ». Une des propositions provient d’un infra-système situé à niveau différent de celui de l’observation, et invisible ou fusionné pour l’acteur. L’opposition entre les deux affirmations ou injonctions ne devient paradoxe que si elle est la résultante d’une « confusion de niveaux « logiques » distinct et hiérarchisés » (BAREL, 1989, p. 56).

Ce contexte rend la situation non seulement insoluble, mais surtout invivable pour l’acteur. À chaque fois qu’il tente d’agir dans une direction, non seulement il ne résout pas la situation, mais il l’aggrave. La situation devient insensée ou sans « sens » pour l’acteur. Nous entendons par « sens » la définition qu’en propose Barus-Michel:

Le sens peut être défini comme ce qui est, à un moment donné, éprouvé par un sujet individuel ou collectif comme la cohérence unifiante d’une situation [...] la production de sens repose sur cet enchaînement volontaire d’éléments signifiants (représentations électives), élaboré par le sujet (individuel ou collectif) pour se soustraire au chaos des choses et aux constructions imposées (BARUS-MICHEL, 2004, p. 22).

Cette construction de sens est nécessaire à l’individu, « Le sujet existe comme tel dans une tension pour faire du sens: donner du sens à ce qu’il est, à ce qu’il fait, à son expérience, à ses relations aux autres » (BARUS-MICHEL, 2004, p. 17). Dans les situations paradoxales que nous avons observées, cette absence de sens était identifiable dans le discours des acteurs de ces situations. Ils exprimaient explicitement ou implicitement une incapacité à orienter l’action dans une direction ou dans une autre, une impossibilité à donner une signification à la situation ou aux comportements de l’autre ou à ses propres comportements, une difficulté à exprimer ses ressentis parce que considérés comme incohérent avec la situation, ou inappropriés.

Agir sans sens est une souffrance, mais agir sans sens dans un travail ou l’engagement intime est fortement mobilisé comme dans le travail social, est un redoublement de cette souffrance. «Le sens étouffé est toujours susceptible d’explosion ou de dépression» (BARUS-MICHEL, 2013, p. 186). La punition de tous les choix possibles, de façon répétée, à la manière d’un apprentissage, empêche la victime « de se doter d’une image stable de l’univers qui l’entoure » (BAREL, 1989, p. 256). C’est ce qu’a décrit Bateson dans le processus de double-bind: il empêche de prendre de la distance avec ses émotions pour les organiser et les gérer, c’est à dire qu’il empêche le processus de symbolisation, et donc la mise en sens des événements vécus. Ces situations ont des effets centrifuges ou centripètes. Centrifuge quand l’individu « explose » en devenant lui-même incohérent, posant des actes qui n’ont plus de sens ni pour lui ni pour les autres, contraire à toute logique ou contraire à la déontologie et a priori incohérent avec sa mission. Centripète quand l’acteur « implose » ou s’effondre sur lui-même sous la forme de la dépression, de burn-out, sorte de fuite « psychique » devant cette situation impossible afin de ne plus être confronté à la souffrance qu’elle produit, la distanciation ultime étant le suicide.

Les contradictions non-traitées dans le registre symbolique peuvent court-circuiter, c’est ainsi que l’on peut comprendre l’injonction paradoxale et ses effets de dommages psychiques pour qui s’y trouve exposé et n’en peut dire mot…/…La résistance qui s’exprime comme un refus de coopération…/….n’est autre que le retournement de l’énergie contre ce qui la représente (BARUS-MICHEL, 2013, p. 178).

Transposition du modèle théorique dans le champ de l’action sociale

En partant des principes définis plus haut, et après une étude approfondie des valeurs, des méthodes et des conditions d’exercice du groupe professionnel que représente les travailleurs sociaux, nous avons cherché à confronter ce modèle hypothétique de compréhension des situations complexes à une réalité. En l’occurrence, nous avons observé sur une période d’une année les problématiques rencontrées par les professionnels dans un établissement de la protection de l’enfance. L’établissement en question est une institution qui accueille en hébergement permanent des mineurs retirés temporairement ou définitivement à la garde de leur famille pour des raisons de sécurité physique ou psychique. Soit les parents ne garantissent pas la sécurité affective ou matérielle de leur enfant (différentes formes d’abandon ou d’incapacité à exercer la fonction parentale), soit ils le mettent en danger directement (violence de toutes formes tournée directement vers l’enfant), soit ils sont démunis face aux comportements de leur enfant et n’arrivent plus à les gérer (violence de l’enfant ou comportements déviants). Nous avons choisi d’observer les situations posant problème au travers des situations rapportées et analysée dans un Dispositif d’Analyse des Pratiques (ADP) conduits par un intervenant extérieur.

Illustration par un exemple de situation recueillie en ADP

Parmi les 12 situations décrites et analysées en ADP, toutes ne révélaient pas des paradoxes. Parmi celles mobilisant des paradoxes nous avons identifié trois champs de paradoxes: Les paradoxes en lien avec la relation éducative entre le professionnel et l’enfant accueilli ; Les paradoxes en lien avec la collaboration éducative parentale avec les familles des enfants placés ; Les paradoxes en lien avec les contraintes structurelle et institutionnelles. Nous ne développerons ici qu’un exemple de situation concernant la relation éducative.

La situation concernait les comportements violents et dangereux d’un jeune pris en charge dans l’établissement et pour lequel la direction envisageait éventuellement un changement de foyer. Compte tenu de la difficulté des participants à évoquer et à analyser cette situation, on pouvait en déduire que celle-ci touchait un point sensible au sein de l’équipe. Ce jeune avait été changé d’unité parce que la relation avec les travailleurs sociaux de l’unité dans laquelle il était pris en charge devenait trop fusionnelle. Mais en réaction, se sentant en quelque sorte de nouveau rejeté, le jeune en question adoptait des comportements violents et dangereux dans la nouvelle unité avec ses nouveaux éducateurs. L’équipe de travailleurs sociaux présentait la situation sous la forme du dilemme suivant: soit ils maintenaient le jeune dans le nouveau service ce qui avait pour effet négatif d’entretenir ses comportements violents, mais qui à terme aurait pour effet de se distancier des travailleurs sociaux « repères » ; Soit ils remettaient le jeune dans le service initial avec pour effet positif de le sécuriser affectivement mais ce qui risquait à terme de renforcer la relation fusionnelle avec les travailleurs sociaux « repères ». Toutes les tentatives d’amélioration de la situation n’étaient pensées qu’autour de l’alternative du maintien ou de l’annulation du changement de service. Par exemple, n’accueillir le jeune dans le nouveau service que pour certaines activités et le laissé dans le service initial pour d’autres activités. Mais ces tentatives ne produisaient que les renforcements des effets négatifs des deux options. Et plus le temps passait, plus l’équipe de travailleurs sociaux rentrait en tension, notamment entre ceux du nouveau service qui subissaient l’agressivité du jeune et accusaient les travailleurs sociaux « repères » d’avoir mal fait leur travail éducatif, et les travailleurs sociaux de l’ancien service qui accusaient ceux du nouveau service de ne pas savoir s’y prendre avec lui. Au moment où la situation fut abordée en ADP, plus aucune action n’était tentée, le jeune était maintenu dans le nouveau service, posait des actes de plus en plus violent à l’intérieur et à l’extérieur du foyer, ce qui lui valait des sanctions de plus en plus nombreuses et importantes, et les travailleurs sociaux de l’ancien service avaient de plus en plus de mal à tenir une relation apaisée avec le jeune. Un changement de foyer avait même été évoqué par la direction, changement dont on imagine sans peine qu’il risquait d’aggraver le comportement (rupture totale avec les travailleurs sociaux « repères »), ce que reconnaissaient les travailleurs sociaux. Mais dans le même temps, ils semblaient incapables d’imaginer d’autres solutions tant ils semblaient avoir épuisé toute leur énergie. Certains envisageaient même cette solution comme un soulagement qui aurait l’avantage d’apaiser les relations au sein de l’équipe et la culpabilité de chacun pour avoir « raté » l’accompagnement de ce jeune. En suivant le modèle théorique de paradoxes selon Barel, on observe au moins trois niveaux mobilisés pour les travailleurs sociaux:

  • - Une dimension personnelle avec une atteinte de l’estime de soi. C’est à cette dimension que l’on peut imputer les réactions très affectives des travailleurs sociaux s’accusant mutuellement d’incompétence. Pour les nouveaux, l’attitude incontrôlable du jeune entretient un sentiment d’incompétence. Pour les travailleurs sociaux « repères », l’attitude du jeune entretient un sentiment de culpabilité de n’avoir pas su gérer la bonne distance dans la relation. De plus ils souffrent de mettre à mal le jeune par ce choix de changement de service, comme s’ils le trahissaient. Ils craignent qu’il n’était pas prêt à cette distanciation et regrettent de l’avoir engagée sans pour autant demandé un retour en arrière.

  • - Une dimension professionnelle s’appuyant sur des techniques et des principes en lien avec l’identité professionnelle. Même si cette décision leur coûte affectivement, ils sont convaincus que cette distanciation est nécessaire et que ce serait mal faire leur travail que de laisser s’installer une relation fusionnelle. Ils doivent donc imposer au jeune cette épreuve, pour son bien, ou tout du moins, en référence aux savoirs et savoirs acquis durant leur formation.

  • - Une dimension institutionnelle qui correspond à la manière dont est régulée cette problématique au sein de l’équipe et de l’établissement. La situation a été évoquée d’abord parce que les travailleurs sociaux du nouveau service semblaient incapables de gérer le jeune. Le chef du service a alerté la direction sur les comportements du jeune ce qui a valu au jeune un entretient disciplinaire. C’est cet évènement qui a déclenché la prise de conscience du malaise, et d’abord pour l’équipe du nouveau service. Les comportements sont tels qu’ils finissent par troubler l’ordre du foyer et les autres jeunes et c’est la direction qui envisage le changement de foyer, considérant que l’équipe n’est plus en capacité de les gérer ou encore qu’il faille sanctionner de façon définitive les comportements pour que le jeune comprenne la gravité de ses actes.

Les trois attentes des trois niveaux rentrent en conflit. L’institution veut de l’ordre dans son foyer, les travailleurs sociaux sur le plan professionnel veulent favoriser l’autonomie du jeune, les travailleurs sociaux sur le plan personnel veulent le protéger d’une rupture affective trop violente.

Nous retrouvons ici les trois caractéristiques des situations paradoxales:

  • - Il semble impératif d’agir sans délais, c’est la force de l’injonction.

  • - Elles semblent exclusives, dans une logique de « ou bien ». C’est soit A, soit B.

  • - Chaque proposition, en cas de réalisation, aggrave l’aspect négatif de la situation que pourrait améliorer l’autre proposition, et au final aggrave la situation.

La réflexion tourne en boucle selon la logique suivante:

  • - Formulation d’un énoncé de sens qui se présente comme recevable et légitime: il faut limiter l’attachement du jeune aux travailleurs sociaux.

  • - Formulation d’un second énoncé niant la valeur de vérité du premier: rompre le lien avec les travailleurs sociaux repère met en grande difficulté psychique le jeune ;

  • - Production d’un troisième énoncé ou « méta-message » qui nie la valeur de vérité du second énoncé et rétablie la légitimité du premier: Si on ne distancie pas le jeune des travailleurs sociaux « repère », la relation va devenir fusionnelle et handicaper lourdement le jeune dans sa construction psychique.

Or pour les travailleurs sociaux, les trois niveaux qui représentaient trois systèmes distincts leur apparaissaient comme étant un seul et même système. Ils ne distinguaient pas que les différentes injonctions provenaient de logiques différentes et tentaient désespérément de les mettre en œuvre comme s’il ne s’agissait que d’une seule injonction cohérente. Malgré leurs efforts nombreux et importants, le jeune n’améliorait pas son autonomie affective vis-à-vis des travailleurs sociaux, il restait fragilisé dans on équilibre psychique et l’exprimait dans ses comportements, il posait des problèmes d’ordre de plus en plus importants à l’institution.

On voit ici que c’est le contexte même de la relation éducative qui génère des injonctions paradoxales. Ils doivent établir une relation éducative authentique, suppléant la défaillance de l’action éducative parentale, sans toutefois l’habiter complétement. Autrement dit, ils doivent à la fois engager pleinement leur subjectivité et la contenir dans un cadre référentiel technique et déontologique. Ils doivent sécuriser affectivement l’usager par la relation qu’ils entretiennent avec lui et dans le même temps limiter l’attachement affectif de l’usager en direction de leur personne. Or ces deux orientations mobilisent des dimensions différentes l’une affective et l’autre technique.

Une dimension supplémentaire vient s’ajouter avec l’institution. Le contexte des institutions collectives avec hébergement entraine des contraintes, notamment de ne pas pouvoir tolérer des comportements qui mettent en danger les autres usagers, ou qui risquent de délégitimer l’institution dans son autorité. Le temps est donc compté pour le jeune et la direction vient ajouter une pression supplémentaire sur les travailleurs sociaux un peu comme si deux logiques se confrontaient: la logique de l’institution qui veut résoudre le problème que lui pose ce jeune à savoir les comportements déviants, et la logique des professionnels qui veulent résoudre le problème du jeune à savoir le déséquilibre psychique qui l’amène à commettre des actes déviants.

Quels principes pour les paradoxes dans le travail social et quel accompagnement ?

Dans toutes les situations paradoxales, et quel que soient les champs concernés (relation éducative, collaboration avec les parents, les contraintes institutionnelles), nos analyses ont montré que ces situations confrontaient au moins deux niveaux de système dans les trois déclinés plus haut: dimension personnelle, dimension professionnelle, dimension institutionnelle. Les deux premières mobilisent deux facettes de l’identité: l’identité pour soi et l’identité professionnelle. La dernière comprend en fait deux dimensions qu’il faudrait pouvoir distinguer, la dimension groupale qui est l’identité pour autrui en lien avec la place que l’individu occupe ou souhaite occuper au sein du groupe de professionnel ou que le groupe lui laisse occuper. La dimension proprement institutionnelle avec une identité reliée au statut de salarié avec un lien de subordination à l’institution.

Autrement dit le travailleur social doit gérer des injonctions en provenance de ses convictions intimes, des règles du métier, du groupe que représente l’équipe et de l’institution par le biais de ses supérieurs hiérarchiques. Dans la plupart des cas, ces niveaux de systèmes sont cohérents entre eux et produisent des injonctions unifiées, ce qui entretien l’illusion de fusion des systèmes. Parfois, certaines situations semblent tournées en rond, restées insolubles et génèrent un mal-être profond.

Face à ces situations paradoxales, les professionnels peuvent être amenés à répondre de différentes manières. Nous avons aussi étudié ces réponses et analyser les réponses reconstruites au cours de la séance d’ADP avec l’intervenant. Les réactions des acteurs pris dans ces situations ont été organisées par Barel sous le terme de stratégie comme des réponses pour tenter d’en maitriser les effets. Pour l’acteur « c’est d’abord ne pas subir passivement une situation (et en pâtir en général). Ce n’est pas non plus annuler le paradoxe ou la double contrainte en les dépassant » (BAREL, 1988, p. 18). Ces réponses peuvent être modifiées ou réélaborées à différents moments et dans différents espaces comme c’est le cas pour les situations abordées dans le dispositif d’ADP.

Quand les injonctions sont très fortes et que l’individu est pressé d’agir par un élément extérieur, il va balancer d’une injonction à l’autre. C’est le double-bind de Bateson qui conduit selon lui à la schizophrénie. Barel, quant à lui nomme ce type de réponse « la stratégie de l’oscillation » (BAREL, 1989, p. 254). L’acteur pris dans le paradoxe répond aux injonctions alternativement, comme dans l’exemple où le jeune est parfois dans sa nouvelle unité, parfois dans l’ancienne. À terme cette stratégie rend fou, c’est-à-dire qu’elle entretient le balancement entre les options en présences sans jamais s’arrêter et amène le professionnel à agir de façon parfois « insensés » pour se sortir de l’incapacité à construire du sens et de la souffrance qui en découle.

Dans beaucoup des situations paradoxales amenées par les professionnels dans le dispositif d’ADP, la réponse la plus fréquente face au paradoxe est de ne prendre en compte qu’une seule injonction en provenance d’une seule dimension, ce que Barel nomme des « stratégies simples » (BAREL, 1988, p. 16). L’acteur ne veut ou ne peut identifier toutes les injonctions et les dilemmes qu’elles posent. Pour autant, face à la complexité de la situation, l’injonction non prise en compte se manifeste rapidement pour mettre en échec toute tentative de résolution.

Enfin, après compréhension de la situation, et la prise en compte des différentes injonctions mobilisées dans la situation grâce au travail d’analyse accompagnée par l’intervenant dans le dispositif d’ADP, la réponse élaborée fait appel le plus souvent à la « stratégie du compromis » (BAREL, 1989, p. 236) ou à la « stratégie de compartimentage » (BAREL, 1988, p. 16) selon le terme de Barel. Il ne s’agit pas de faire disparaitre le paradoxe mais d’abaisser la tension entre les injonctions. Dans la stratégie de compartimentage, il s’agit de traiter chaque injonction dans des espaces différents, ou des temps différents. Ainsi elles sont toutes traitées mais n’entrent pas en conflit direct. Pour la stratégie de compromis, il s’agit de faire baisser l’intensité des injonctions. On ne peut pas supprimer les orientations des différents systèmes en présence, mais par contre on peut en négocier la force. Dans la situation décrite plus haut, pour sortir de la position binaire autour du changement de service, il a fallu accepter qu’à la fois il fallait distancier le jeune et qu’à la fois il n’était pas complétement prêt à cette distanciation. Pour éviter le clivage entre les équipes nouveau/ancien service, Les équipes et l’intervenant ont imaginé, plutôt que de déplacer le jeune dans chaque service avec la stratégie de l’oscillation, qu’il fallait au contraire reconstruire de l’unité autour du jeune. Les équipes entre nouveau et ancien service concerné ont été mixées, pour que les travailleurs sociaux « repères » puissent être en binôme avec les travailleurs sociaux nouvellement mobilisés, ainsi le jeune ne pouvait plus jouer sur l’opposition entre les travailleurs sociaux, mais aussi bénéficier d’un peu de sécurité affective dans son nouveau lieu de vie. Par ailleurs les travailleurs sociaux ont aussi pu faire tomber les représentations d’incompétence mutuelles en travaillant au quotidien ensemble pour au contraire s’enrichir mutuellement de leur expérience. Ils ont ainsi pu répondre aux deux injonctions, sécuriser affectivement l’usager et limiter son attachement affectif à un travailleur social en particulier.

Conclusion

Le travail conceptuel d’Yves Barel est riche et permet, par sa transposition d’élaborer aussi une nouvelle compréhension des enjeux du travail social. L’activité des travailleurs sociaux est empreinte structurellement de paradoxes comme nous l’avons vu, et particulièrement de paradoxes « existentiels » c’est à dire qui ne peuvent s’imposer à l’acteur que s’ils sont subjectivement engagés dans la situation. Il est intéressant alors de se questionner sur l’origine de cet engagement subjectif dans cette activité d’intervention sociale. On peut penser qu’il y est plus puissant que dans d’autres activités de par la nature des actes et des situations, le travailleur social est en quelque sorte son premier outil de travail. Mais il faut aussi prendre en compte les contextes sociétaux et leur évolution. Les transformations sociétales liées à la postmodernité avec l’avènement de l’individu comme figure centrale et la défiance vis-à-vis des contraintes du collectif et des institutions ont des répercussions sur les comportements des nouvelles générations de publics, la commande sociale faite aux institutions du travail social et les moyens qui leurs sont attribués, et enfin sur les conceptions même de l’intervention sociale. Comme dans beaucoup d’autres domaines de la vie en société, le travail social est en transition d’un état vers un autre, sans que les contours de ce nouvel état soient bien définis ce qui ne fait, bien évidemment augmenter la mise à jour de la séparation d’infra-systèmes qui semblaient jusqu’alors fusionnés et provoquer des situations ou les paradoxes se révèlent.

Références

BAREL, Y. Du bon usage du paradoxe dans la pensée et la pratique sociale. Pratiques de formation, Paris, analyse, n. 16, p. 13-26, déc. 1988. [ Links ]

BAREL, Y. Le paradoxe et le système. Grenoble: Presses Universitaires de Grenoble, 1989. [ Links ]

BARUS-MICHEL, J. Souffrance, sens et croyance, (Sociologie clinique). Ramonville Saint-Agnes: Ères, 2004. [ Links ]

BARUS-MICHEL, J. L’énergie du paradoxe. Paris: Desclée De Brouwer, 2013. [ Links ]

Received: October 02, 2018; Accepted: October 05, 2018

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LS: Doutora em Ciências da Educação, e-mail : laurent.sautereau.pro@gmail.com

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